Je suppose que vous grillez tous d’envie d’en apprendre et d’en voir un peu plus sur le Saint- Laurent que ce qu’en ont divulgué quelques conversations éparses et quelques photos partagées.
Voici donc un aperçu des différentes expéditions dans la Belle Province.

D’abord les parcours.
Cinq équipages se sont lancés dans l’aventure, un en juin et quatre en septembre. Une particularité certainement inspirée par un certain protectionnisme déguisé en bonne raison, nous a obligés à recourir aux services de chefs de bord locaux, accessoirement propriétaires ou copropriétaires des bateaux.
Il existe bien des « guides » des marinas, nous en avons vu deux. L’un est un annuaire commercial répertoriant toutes les entreprises de tous ce qui se vend ayant un rapport avec l’eau, se trouvant plus ou moins le long du fleuve, l’autre qui donne pour tous les points abordables en bateau de plaisance, une liste exhaustive documentée des bars, restaurants, hôtels, boîtes de nuit etc… propres à distraire le navigateur à terre. Eventuellement un petit schéma de la marina quand elle existe.
Rien sur les approches !
Ceux qui ont utilisé les guides Fenwick ou Editions du PenDuick comprendront.

Cela n’empêche pas les québécois d’être très sympathiques et accueillants bien que, de temps en temps, manquent les sous-titres.
Quitte à passer quelques heures en avion pour l’aller et une de moins au retour, la plupart des participants en a profité pour visiter le pays soit avant, soit après, soit les deux.
Evidemment, le Lac Saint-Jean, le Fjord du Saguenay, Montréal, Tadoussac, La Gaspésie ont été visités. Quelques-uns n’ayant pas peur de franchir les frontières ont poussé jusqu’à New-York.

Sur l’eau, compte tenu des marées et de la quasi inexistence de mouillages abrités, les choix ont été plus restreints.
Soit atteindre Tadoussac en faisant largement appel au moteur, soit naviguer le plus possible à la voile faire demi-tour un peu moins loin.
Chaque équipage en a décidé suivant son goût.

Je vous laisse à présent partager notre périple au travers des photos et avis recueillis auprès des participants dans ce pdf

Les photos de Gabriel sont disponibles sur son site: http://www.saint-malo-photo.com/diapos_divers/quebec_2017/index.html

Les photos de François

Les photos de Florence

 

Le périple de Sirénade en Méditerranée se poursuit, et l’objectif était cette fois d’assister aux Voiles de St Tropez. Difficile de savoir où donner de la tête tant la zone de navigation est riche de sites à explorer. Notre première étape sera donc la plus longue puisque nous rejoignons le vieux port de Cannes à l’occasion d’une arrivée dans la nuit. Les dauphins nous auront rendu visite en cours de route. Une nuit toute relative car les lumières des yachts au mouillage ou au ponton nous permettent de gérer tranquillement notre atterrissage.

La journée du dimanche se déroulera à terre, de St Paul de Vence à Monaco, histoire de regarder les riches qui regardent les pauvres qui regardent les riches. Spectacle amusant qui ne nous fait pas oublier le plaisir de déambuler à pied dans St Paul ou sur le rocher. Manifestement, notre  présence à Cannes à été signalée car une bien belle soirée se prépare sur la plage du Carlton. Nous n’aurons malheureusement pas le sésame permettant d’y participer, mais nous serons aux premières loges depuis Sirénade pour assister au feu d’artifice.

Le lundi démarre par la visite du vieux Cannes. Les immenses yachts présents dans le port sont en train d’être préparés pour servir de lieu de négociation pour la semaine du duty free (alcool, parfums,…). Etonnant ! Nous filons ensuite vers Port Grimaud, il ne faut pas oublier que nous sommes venus pour les Voiles ! L’arrivée dans le golfe de St Tropez nous met dans l’ambiance du lendemain, beaucoup de … voiliers évidemment. L’accueil efficace de la capitainerie est précieux pour s’amarrer vite et bien.

Une navette nous amène directement dans port de ST Tropez le mardi. Emerveillement de voir ces 300 voiliers de course, très anciens ou très modernes, parfois immenses, dans un tel site. Somptueux ! Tout ce petit monde manœuvre à merveille dans le port et sur l’eau, la météo est de la partie. En fin d’après-midi, chacun reprend sa place au port, l’occasion d’admirer à nouveau ces monstres manœuvrés. Génial !

Le mercredi commence tristement. Un voilier a dérapé dans la nuit et il se fait drosser sur la digue de Port Grimaud. Le carré est  encore ouvert, les haubans rompent. Voilà qui refroidit un peu avant de reprendre la mer. Nous partons alors que les voiliers sortent de St Tropez pour les régates du jour. Du coup, on est au milieu d’eux. Les appareils photos crépitent au rythme du craquement des monstres de carbone lorsque les écoutes sont bordées. Nous parvenons dans l’après-midi au mouillage à Port Cros, un lieu bien paisible après l’animation du matin. L’annexe est gonflée, longue randonnée à terre s’organise.

Jeudi, c’est piscine ! Ou plutôt baignade car nul ne peut résister à un petit bain le matin. Départ ensuite vers Porquerolles ou nous nous amarrons dans le port en raison d’un gros coup de mistral annoncé. Grande randonnée l’après-midi, avec du dénivelé…

Vendredi, c’est encore… randonnée ! Les rafales à 42nds que nous observons dans le port n’incitent pas trop à larguer les amarres.

Samedi, c’est … fini. Nous repartons vers Toulon, non sans une halte réparatrice devant la plage de Monaco (dans la rade de Toulon). L’ambiance est estivale, un bain s’impose avant de retrouver notre port d’attache méditerranéen, la vieille Darse à Toulon.

Une semaine riche et variée qui donne envie de prolonger les explorations sous ce climat particulièrement agréable. Mais il faut maintenant retravailler avant de repartir !

Michel Latouche

Aux abords de la Darse Vieille, rodent des clandestins et des marins en goguette parmi lesquels je devrais  trouver un équipage pour ma prochaine expédition dans les iles.

Au fond d’un bar interlope, tenu par un rastaquouère au regard chafouin, j’installe mon bureau de recrutement. L’examen se passe autour de chopes de bière que j’imputerai sur mon budget de fonctionnement sous la rubrique « avitaillement divers ». Le ventilateur déglingué brasse un air lourd de fumée et de relents d’alcool frelaté sur des clients dont le regard torve ne m’inspire aucune confiance.

A la fin de la soirée, la facture du tavernier est impressionnante, mais j’ai trouvé un mécano, un cuistot, et un second.

Dès le réveil, forcément difficile après ces laborieux entretiens d’embauches, notre mécano se contorsionne pendant deux jours pour réparer notre moteur rendu cacochyme par l’utilisation d’un fuel espagnol de contrebande. Malgré une consommation excessive de tabac et de bière, il a conservé ses compétences,  même s’il lui arrive de commettre quelques fautes de goût (comme celle qui consiste à utiliser la brosse à dent du Chef de bord pour ses travaux de décapage des crépines). J’ai quand même pris soin de lui confisquer burin et marteau dont il pourrait faire un usage immodéré dans un accès d’enthousiasme incontrôlé.

Pour sa part, Gérard contribue au moral des troupes en débitant un saucisson d’un fort beau gabarit, qu’il arrose de force gibolin,  entre deux histoires de Melon et Melêche.

Profitant du beau temps, nous nous accordons une pause à St Mandrier. La rade est encombrée de ces bateaux gris où l’on salue tout ce qui bouge, et où on repeint le reste.

Après deux jours de travaux acharnés, le moteur tourne rond, et nous appareillons vers Porquerolles en contribuant vigoureusement au changement climatique, car le temps reste frais à notre goût. Notre fuel lourd non désulfuré fait merveille pour forer la couche d’ozone au bénéfice de notre hâle.

Amarrés sur pendille à Porquerolles, après cet exercice délicat qui consiste à frapper les amarres sur les bittes, nous attendons vainement les colliers de fleurs, danseuses nues et éléphants blancs, que les indigènes avaient naguère pour coutume d’offrir aux navigateurs qui daignaient faire escale chez eux. Hélas, le modernisme et la civilisation les ont remplacés par des WC mobiles, et chimiques de surcroit, car l’eau manque également sur cette terre déshéritée et oubliée des hommes (et des femmes, pour rester politiquement correct). Gérard qui en testait l’hospitalité échappe de justesse à un embarquement forcé : un Fenwick avait déjà commencé à le charger sur le ferry, il sort précipitamment de la cabine, le pantalon aux chevilles en vociférant force jurons marins. Cette sécheresse ne fait pas notre affaire, car nous serons rapidement réduits à boire le pastis sec et à nous brosser les dents avec du whisky pour préserver nos réserves.

Un coup de mistral nous bloque une journée entière dans le port, les drisses claquent, le vent siffle dans la rue du quai, et nous en profitons pour explorer l’ile à la recherche de vivres frais.

Vêtus de nos tenues de brousse, nous taillons notre piste dans une jungle de lauriers roses, à coups de sabres d’abattis, provoquant la fureur d’un indigène grognon sorti en vociférant d’une case délabrée.

Nous arpentons des chemins rocailleux, serpentant dans une végétation aride, où il n’est  pas conseillé d’allumer une cigarette. Ici, même les teckels et les tortues sont fossilisés.

Chemin faisant, nous croisons un légionnaire en retraite qui refusera catégoriquement de nous céder une de ses chèvres. Gérard comptait nous cuisiner un sauté de cabri, recette qu’il tient d’un tirailleur sénégalais rencontré pendant  son séjour à Bouzbir dans les chasseurs d’Afrique.

 

A la tombée de la nuit, faute de gibier, Gérard tente vainement d’attraper quelques rossignols de caroubiers (excellents en brochettes), et se rabat,

déçu, sur l’échoppe d’un traiteur qui propose un bar au fenouil accompagné de tagliatelles, et arrosé d’un cru local. Les portions sont un peu justes et l’équipage affamé réclame des nouilles encore !

Le lendemain nous appareillons vers Port Cros, le génois est envoyé, l’écoute soigneusement lovée afin qu’elle ne se brouille. L’étrave de Sirénade fend les flots dans un chuintement humide et suave .

 De nombreux explorateurs occupent déjà une majorité de bouées, nous arrivons à  point pour prendre la dernière place au ponton, près d’un navire battant pavillon suédois. Une lueur de convoitise s’allume dans les yeux de la partie masculine de l’équipage, qui aimerait bien que la femme du capitaine les fasse mander à bord.

Après les palabres d’usage auprès de l’autorité locale, coiffée d’un bonnet en peau de chèvre à la manière du compagnon de Robinson Crusoe, nous obtenons notre aussweiss en échange d’un peu de verroterie.

Nous entamons alors un long périple sur des chemins escarpés en direction du sentier sous marin où l’on peut observer la faune aquatique locale :

 des panneaux indicateurs suspendus à des bouées jalonnent l’itinéraire, et décrivent les espèces visibles au visiteur palmipède. Aucun d’entre nous ne parviendra hélas à se saisir d’une dorade ou autre sar, dont l’agilité excède largement celle d’une boite de paté Hénaff.

A titre de consolation nous faisons une halte dans une des tavernes qui bordent le port, face au soleil couchant. L’ambiance est festive, et les matelots aux démarches chaloupées déambulent sur le quai dans l’espoir d’un malentendu. Nous y croisons  David, un ancien de Mer Amitié.

 

Le lendemain à l’aube, après le yoga matinal de notre cuisinier, nous appareillons vers Bormes les Mimosas, en passant par l’anse de Port Man où nous allons réveiller les bateaux à l’ancre.

La marina de Bormes est accueillante et bien tenue par d’accortes hôtesses au regard espiègle, nichées comme des pinsons en haut d’un sémaphore flambant neuf.

Poussés par le démon  de l’aventure, nous montons  dans une patache conduite par un indigène qui gesticule sa sympathie à chaque congénère qu’il croise en route. La  vieille ville est pittoresque, on y rencontre des acharnées du selfie compulsif, et des toilettes publiques qui offrent une vue superbe sur le paysage environnant.

 

 

Cap sur Toulon, et retour à la marina de la Darse vieille. L’équipe du port, toujours aussi sympathique nous accueille, très étonnée que nous ayons pu mener à bien une expédition aussi périlleuse, mais un peu déçus que nous ne ramenions ni cargaison de doublons espagnols ni épices rares !

Patrick COLLETER

 

 

 

 

Quelle belle découverte que ce périple en Méditerranée de Palma de Majorque aux îles du Frioul, en passant par Minorque, Cassis, les calanques et le vieux port de Marseille, soit environ 430 milles parcourus, dont une traversée de 200 milles entre Minorque et Cassis.

Une nouvelle fois, cette croisière a permis de casser les préjugés que l’on peut avoir lorsque l’on ne connaît pas en détail une zone de navigation. Un grand plaisir de marcher dans Palma, ville à l’architecture étonnante et magnifique, de mouiller dans des calas de Majorque et Minorque parfois seuls (eh oui) et jamais surpeuplées, de parcourir Ciutadella (Minorque) le jour et la nuit, de se baigner dans une eau (très) chaude, de faire de la voile aussi car il peut y a avoir du vent !  Nous n’avons pas su résister aux tapas, sangria, et autres paellas locales…

Il fallait pour tout cela un bon bateau, inutile de préciser que Sirénade et son indispensable bimini ont été largement à la hauteur. Les experts du matelotage ont même mis en place un dispositif pour faciliter la sortie du bain à partir de l’échelle. Etonnamment, ce petit manque n’avait pas été constaté en Manche... Les rois du plongeon se sont défiés (souvent) avec de magnifiques acrobaties toutes plus improbables les unes que les autres, les plongeurs (avec bouteilles) ont eu deux fois l’opportunité d’aller découvrir les fonds sous marins.

Il y a eu aussi cette traversée (au moteur…) de 33 heures entre Minorque et Cassis ! Heureusement agrémentée de plusieurs animations (le chef de bord doit parfois être inventif pour garder l'équipage en éveil). D’abord le survol d’un Falcon de la marine nationale qui nous a contrôlé (survol  très rapproché, contact radio en VHF, questions diverses), ensuite de plusieurs rencontres avec les dauphins, dont une inoubliable à la tombée du jour. Les photographes étaient à leur affaire.

Arrivés en France, les calanques ont été explorées avant de trouver refuge au Frioul en prévision d’un mistral puissant. L’exploration à pied des îles du Frioul a aussi réservé de belles surprises, à l’occasion d’un pique-nique au bord de l’eau suivi d’un bain dans la plus belle calanque locale.

Mais une croisière de Mer Amitié ne serait pas totalement réussie sans les relèves d’équipage. Moments toujours joyeux où les chefs de bord se passent les consignes techniques, où les équipages échangent sur leurs découvertes, surprises et bonnes adresses. Viennent parfois se  joindre des adhérents exilés dans le sud et pas avares de conseils sur la zone de navigation. Du pur bonheur !

Michel  Latouche